mardi 14 février 2012

Plus Angela que Nicolas ?

On n’a plus besoin d’être d’Extrême droite pour en parler... Circus politicus, c’est le dernier pavé dans la marre que viennent de jeter deux auteurs, Christophe Deloire et Christophe Dubois, qui ont beaucoup fait parler d’eux en publiant, en 2006, Sexus politicus. Attention : le « cirque » est moins drôle que le « sexe », mais politiquement ce deuxième ouvrage est capital. Ce que pointent les deux Christophe, c’est rien moins que la crise mortelle dans laquelle se débat notre démocratie, en particulier depuis l’avènement de l’euro. 
 
La première partie de cet ouvrage nous laisse apprécier l’ampleur du déficit démocratique dont souffre l’Union européenne pour pouvoir être belle. On lui fait perdre les kilos démocratique en trop, en remettant sa gestion à des grands commis discrets, qui imposent des plans ourdis dans le silence de leur cabinet, aujourd’hui à la Grèce, demain à l’Espagne ou à l’Irlande. A la France déjà. C’est ainsi que nos deux auteurs citent un article de l’ineffable Michel Barnier, paru dans Libération en 2002, qui posait gravement la question de Frédéric de Prusse à Condorcet : « Est-il utile de tromper le peuple ? ». Pour les eurocrates, incontestablement, la réponse est positive : « A l’heure où candidates et candidats à la présidence de la République préparent calicots, arguments et ripostes, il est une sorte de secret dans le débat politique français ». Eh bien ! Ce livre rompt la loi du silence. Il redit solennellement ce que Michel Barnier avait laissé échapper comme négligemment dans Libération : « Le secret, c’est que la plupart des décisions que les candidats vont s’engager à prendre ne relèvent plus d’eux seuls ». Et nos deux auteurs aggravent la mise : « Plus d’eux du tout devrait-on dire aujourd’hui ». Voilà pourquoi la politique est devenue un grand cirque : elle ne sert plus à rien. Les technocrates veillent dans l’ombre. On ne prend plus de décisions. On fait appliquer leurs règles. Les Français du reste ne sont pas dupes. N’est-ce pas ce que signifie ce sondage Louis Harris de l’été 2011 selon lequel les Français compteraient plus sur Angela que sur Nicolas pour les sortir de la crise financière ? Le discrédit des politiques est de plus en plus total.
 
Mais alors qui gouverne ? C’est la deuxième question-clé de ce livre. Certain livre récent met en cause l’énarchie… C’est vieux, c’est ringard, c’est désespérément hexagonal. Le problème est mondial. Ce sont des instances mondiales qu’il faut découvrir. Nos deux auteurs n’ont décidément pas froid aux yeux. Eux vont jusqu’au Siècle (pour la France), jusqu’à la Commission trilatérale, jusqu’au Bilderberg, trois instances qui fabriquent l’unanimité technocratique dont les nouvelles Institutions internationales ont besoin pour continuer de tisser notre destin sans nous. Ces sont les grandes officines du consensus, non pas des sociétés secrètes, mais en tout cas des organisations dont il ne faut pas parler, comme Yves Calvi a pu le constater un jour durant son émission C dans l’air. Le mot facile, pour disqualifier toute volonté de savoir, est le mot « complotisme ». Il en faut plus pour impressionner nos deux auteurs, dont l’enquête plonge au cœur des centres de pouvoir réels. Pour comprendre le Circus politicus, il faut saisir que l’essentiel n’est pas notre démocratie, que la vie est ailleurs, que c’est ailleurs que se dessine notre destin et qu'ici... tout est riens. La politique est une comédie. Platon parlait déjà de théâtrocratie à propos de la démocratie athénienne. 
 
La théâtrocratie de Platon ? C’est justement le Circus politicus de Christophe Dubois et de Christophe Deloire. Rien de nouveau sous le soleil !

Christophe Deloire et Christophe Dubois, Circus politicus, éd. Albin Michel 464 pp. 2012 21, 50 euros

7 commentaires:

  1. Cher Monsieur l'abbéG2T, votre recension est parfaite, et très agréable à lire, y compris quand vous parlez de politique (aussi bon qu'en Théologie!).

    Après mes flatteries et compliments habituels à votre endroît (au demeurant parfaitement sincères, n'oubliez pas que je suis dans votre fan-club), une petite remarque: vous allez vous faire -amicalement - gronder par Emmanuel Ratier, qui a justement évoqué ce bouquin, récemment sur RC, et il fulminait contre ces auteurs, qui se donnent des airs d'avoir découvert la poûdre, alors qu'ils ont tout pompé...je crains fort qu'il ne pensât à lui-même, au moins pour partie de ces informations qui font sensation mais que Monsieur Ratier distille de longue date, dans son remarquable "Faits et Documents" sans qu'on lui en soit bien reconnaissant, dans le "grosse presse" sinon pour le piller, sans le cîter.

    Pour l'anecdote, ces journalistes sont venus présenter leur bébé, sur BFM, dans l'une des émissions de très grande écoute -le 12/15 d'Edwige Chevrillon, qui fait dans le hyper-politiquement correct, tout en étant une grande journaliste- et j'étais éberlué d'entendre parler du Bilderberg et autres puissances financières cachées du grand public...je me suis cru un instant sur Radio Courtoisie, j'ai vérifié deux fois la fréquence affichée sur mon poste de radio...InouÏ!

    Quoiqu'il en soit, votre billet d'aujourd'hui est parfaitement bien venu, pour parler de ce bouquin fort original, dans la production journalistique, d'habitude bien insipide.

    J'en profite pour dire bonjour à Benoîte, dont j'ai vu l'intervention au topic précédent.

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  2. Comme le disait guy debord dans "La société du spectacle", "le vrai n'est qu'un moment du faux".

    Mais ce qu'on a du mal à comprendre aujourd'hui, c'est que le vrai est à peu près dévoilé par ceux-là mêmes qui le trament: vous pouvez écouter des "radios communautaires" pour mesurer l'influence de la communauté juive en france, qui ne se cache pas d'inviter à des réunions ultrasionistes des politiciens français pour y célébrer son armée; "BFM BUSINESS" s'invite au forum de davos dont elle reçoit les principaux protagonistes; le grand Orient de france ne se cache pas de compter une "fraternelle parlementaire" dont la liste des membres est facilement consultable par qui veut la connaître; les médias ne sont certes pas invités jusqu'à pouvoir diffuser en "on" les interventions qui ont lieu dans les loges, souvent en tenues blanches, ou ou au groupe du bilderberg; la commission trilatérale se présente comme un rendez-vous informel entre les personnalités les plus influentes du monde; le "siècle" est une petite trilatérale à la française qui aime bien tenir avec un secret folklorique ses assemblées à l'"automobil club" dont chacun sait qu'elles s'y déroulent. Autrefois, l'existence de ces cercles était mise en doute; aujourd'hui, ils ont presque pinion sur rue.

    "Le vrai" se dévoile donc hors spectacle, mais le peuple ne veut pas le voir. Quand le premier ministre Papandreou a le bon sens de comprendre qu'il ne peut pas imposer une telle cure d'austérité aux grecs sans que ceci fasse du ramdamdans la rue, et que le mieux est de recourir au référendum, selon le génie de la grèce, Nicolas sarkozy et angela Merkel lancent contre ce dirigeant félon une levée de bouclier. A quelques semaines de là, le même Président-candidat français, qui s'était déclaré hostile au référendum au point de n'en organiser aucun de tout son quinquennat et d'avoir écrit qu'il n'y était pas plus favorable qu'au droit de grâce dans son livre-programme "Témoignage", publié comme "Sexus Politicus" en 2006, retourne sa veste par rapport aux positions qu'il vient de prendre contre Papandreou, mais surtout pour faire barrage à "la république référendaire" de Marine le Pen, qui est, outre une juste gouvernance, la seule manière dont elle pourrait, élue, s'opposer au barrage systématique que lui feraient les députés, sachant qu'elle ne pourrait répéter deux fois le miracle de remporter l'élection présidentielle et les élections législatives. Le peuple voit cette volteface du Président vis-à-vis du référendum. Or il ne paraît pas en piper mot, ni dans les médias, ni dans les "cafés du commerce".

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  3. (Suite)

    Autre violation de conscience manifeste qui lui fut imposée: ce fut sa participation à la première guerre du golfe. En deux jours, une opinion tout à fait pacifique était prétendument devenue majoritairement belliciste et favorable à l'intervention aux côtés des américains dans l'opération "Tempête du désert". Le peuple pouvait voir qu'on l'avait retourné comme une crêpe, et pourtant il devint effectivement comme on l'avait présenté.

    Autres exemples (et j'en aurai terminé): comment expliquer que le peuple ait pu s'enticher de technocrates aussi éloignés de lui que, successivement, Dominique strauss-Kahn, qui menait une carrière internationale au FMI, et Jacques delors qui, à la commission européenne, pratiquait une politique européenne qui était déjà impopulaire aux yeux des français, dont ce n'est pas d'hier qu'ils la jugent technocratique? Le peuple pouvait voir que de tels engouements ne pouvaient pas lui être inspirés spontanément; et pourtant, il mordit à l'hameçon, par deux fois, sans plus de sens critique que lorsqu'au moment d'aller choisir le candidat à "la primaire citoyenne" socialiste, les médias lui ayant dit que le meilleur candidat de substitution à M. strauss-kahn était françois Hollande, il reporta ses voix sur un candidat auquel il n'aurait jamais pensé, qui avait la bouille d'un petit garçon et autant de doctrine qu'un serin, comparé à la trop ferme Martine aubry, au droitier-libéral Manuel Valls ou au crypto-nationaliste arnaud Montebourg

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  4. Tout cela est connu depuis bien longtemps. Mais toutes ces officines se donnent plus d'importance qu'elles n'en ont réellement (c'est à dire aucune). Le pseudo-secret avec costumes et rituels pseudo-ésotériques ne fait plus frissonner que le bourgeois candide (entre-nous, qui aurait envie de se déguiser pour aller discuter du sort de la société). C'est dans les bureaux que se prennent les vrais décisions (il faut, toujours et encore, relire l'Ancien Régime et la Révolution de Tocqueville ; tout est dit et rien de changé, et puis, bien que moins génial Le mal français de Peyrefitte).

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  5. Circus politicus révèle les dessous d’un véritable « putsch démocratique », une tentative de neutralisation du suffrage universel par une superclasse qui oriente la décision publique.
    Il montre comment le Pouvoir a capitulé devant les puissances financières.
    Il dévoile les stratégies de double discours et d’hypocrisie française entre Paris et Bruxelles.

    Histoires, anecdotes, preuves, documents… tout dans ce livre tend à démontrer que les Indignés ont raison de réclamer une « vraie démocratie » !
    Entrons dans ce Circus politicus où le peuple est jugé dangereux et la démocratie archaïque.
    Nous voici dans les réunions ultra secrètes des Conseils européens où tout se joue, dans les coulisses, dans de mystérieux clubs d’influence où les banquiers américains expliquent la vie à nos politiques, dans les officines et les bureaux d’agents secrets… La France est sous la tutelle d’un pouvoir aveugle.
    La souveraineté, nationale ou européenne, n’est plus qu’une image pieuse entretenue par des « idiots utiles ».
    Une enquête inédite, iconoclaste qui fait surgir une réalité qu’il vaudrait mieux affronter plutôt que de la nier.

    ... et sur Livres en Famille : http://www.livresenfamille.fr/p5785-christophe_deloire_circus_politicus.html

    et en noté... le blog de l'abbé de Tanouarn !

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  6. A Charlotte Lundi

    Je vous prie de bien vouloir m'excuser pour les propos qui suivent mais j'ai l'impression que vous lisez trop de romans policiers de gare ou que vous regardez trop de séries TV.

    Il n'y a ni "réunions ultra secrètes des Conseils européens où tout se joue, dans les coulisses, dans de mystérieux clubs d’influence où les banquiers américains expliquent la vie à nos politiques" ni officines mystérieuses ou "bureaux d’agents secrets".

    Vous me faites pensez à ces (mauvais) romans où l'on voit de beaux cardinaux aux cheveux cencdrés troquant leur soutane pour une tenue de play boy avec un révolver dans la ceinture se glissant à la nuit tombante dans les ruelles de Rome pour rencontrer de mystérieux agents de la CIA, du défunt KGB ou du Shin Beth avec des religieuses déguisées en Mata Hari en leggins ; ou encore pour assister à de mystérieuses réunions de loges plus ou moins maçonniques inconnues avec dignitaires encagoulés. Hélas ! le Vatican fait toujours fantasmer les anticléricaux primaires.

    De grace ressaissez vous et cessez de croire à ces histoires de complots délirantes qui font la fortune des pisse-copies.

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  7. La dernière des journalistes. Il y aurait un complot ourdi au Vatican par des prélats qui mettraient en cause Benoît XVI qui devrait mourir dans l'année, ce qui expliquerait la nomination de nouveaux cardinaux.

    Bref, du n'importe quoi.

    J'ai regardé ce matin Benoît XVI sur KTO lors de la Messe des cardinaux : il m'a paru solide comme le Pont-Neuf ; une main de fer dans un gant de velours. Rien à voir avec son prédécesseur.

    L'Eglise n'a pas besoin d'un saint à sa tête mais d'un Pontife qui gouverne et qui fasse sentir sa férule.

    Le Pape Paul III (Farnèse) a eu beau avoir quatre enfants avec Sílvia Ruffini, c'est quand même lui qui a convoqué le Concile de Trente, réformé l'administration pontificale complètement gangrenée, condamné officiellement, par écrit à deux reprises, la pratique de l'esclavage, et c'est grace à son appui que fut créée la compagnie de Jésus.

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