vendredi 3 août 2012

Quel est notre désir de Dieu

Je voudrais - supportez-le - poser cette question sans convention, sans me sentir astreint à donner une réponse qui aurait été convenue d'avance, au nom de l'Institution. Le catéchisme a du bon, mais il n'a rien à dire sur le désir de Dieu. Expertus potest credere quid sit Jesum diligere. "Seul celui qui en fait une expérience peut CROIRE ce que c'est qu'AIMER Dieu". Et plus précisément : ce que c'est qu'aimer Jésus fils de Dieu dit ici l'hymne du Saint Nom de Jésus. Si nous ne croyons pas, nous n'aimerons pas, nous ne pourrons jamais donner à l'amour toute son ampleur, vraiment surnaturelle et divine.

On a trop souvent cru que le désir de Dieu était seulement une question d'amour. On a répété, après Gilbert Cesbron, dans le grand b... mental des années Soixante : "Il suffit d'aimer". On voulait dire par là : l'amour n'a pas besoin de cette béquille qu'est l'intellect. L'amour va immédiatement à son objet. Il suffit à tout. Le compositeur du Jesu dulcis memoria nous montre bien que sur la terre au moins, on n'en a jamais fini avec la foi, ce mode de connaissance supérieur, qui seul permet l'amour. Expertus potest credere...

La prière, dans la mesure même où elle est un acte de foi est un acte de connaissance. De quoi ? Des dogmes ? Bien sûr. Il faut élever son esprit jusqu'au dogme dans la beauté de leur proposition et s'en nourrir par une attention constante et une méditation qui en intériorise le contenu. Il faut aussi se souvenir que la foi nous propose une véritable science de la vie dans toutes ses dimensions. Les dogmes sont les balises qui nous évitent de nous égarer sur l'Océan de la Divinité. Mais l'objet de la foi est bien plus ample. Quel est l'objet de notre foi ? L'initiative divine sur notre vie. Le salut réalisé dans le Christ Fils de Dieu. Le salut ? Ce Moment où notre vie et la sienne ne font qu'une seule vie.

La connaissance de Dieu s'identifie ainsi à ce que doit être la véritable "science de la vie". Connaître le Christ, sans donner prise aux légendes noires ou aux étroitesses de nos perspectives mentales, connaître le Christ dans l'éblouissement de ce que Pascal appelle très bien les vérités contraires, c'est cela qui nous fait l'aimer comme il doit être aimé. C'est cette connaissance qui provoque en nous le désir.

On en revient à la grande question du désir naturel de voir Dieu, qui faisait florès... avant la Guerre (oui je sais, ça ne nous rajeunit pas). En nous, le désir de voir Dieu n'est pas de l'ordre de l'instinct. Au sens scolastique, ce n'est pas un "désir naturel", mais un "désir élicite"... Plus on connaît Dieu et sa volonté de salut, plus on l'aime. Et lorsque l'on ne le connaît pas, lorsque tout est fait pour nous faire oublier Dieu, lorsque l'athéisme est un véritable conditionnement social, alors, sauf grâce particulière, secrets intérieurs et chemins singuliers, le désir de Dieu disparaît dans les coeurs.

On mesure peut-être mieux, si l'on a attentivement marqué la place de ce préambule sur le désir de Dieu l'importance du combat culturel. Benoît XVI nous disait (c'était à Malte il y a deux ans) que la culture chrétienne était devenu une véritable contre-culture. Cette contre-culture - oh poaradoxe ! - est aujourd'hui la seule culture universelle, celle qui s'impose sur tous les continents. N'en faisons pas trop avec l'Underground. Il est bon qu'il existe de petits groupes underground (le Centre Saint Paul en est un). Mais il ne faut pas perdre de vue la dimension universelle (vraiment "catholique") de la culture chrétienne. Il faudrait que chacun puisse avoir libre accès à cette culture, à ces questions fondamentales et à la diversité des solutions qui leur ont été apportées, toutes tournant, depuis le début, autour du christianisme ou d'une réécriture humaine du christianisme, toute tournant depuis le début (depuis le Paradis terrestre) autour de la question de la Divino-humanité. La question : comment diviniser l'homme est égale pour l'homme à la question : comment survivre ? C'est pourquoi elle était devenue, jusqu'au XXème siècle, la question fondamentale.

Ainsi à travers les questions que cette culture l'amène à se poser, chacun pourra-t-il redécouvrir l'élan qui a porté ses ancêtres à construire les cathédrales ou à partir en mission dans les pays les plus improbables au péril de leur vie. D'une manière ou d'une autre, pour chacun, la divine invitation retentira dans ses oreilles et il sera amené à se positionner par rapport à elle.

L'Eglise a trop souvent voulu marginaliser la vie intellectuelle, ou encore (dans les grands moments, après la Renaissance) confondre la pensée avec l'érudition. Les gens qui pensent sont dangereux pour les institutions trop fragiles. Réfléchir c'est commencer à désobéir. On connaît ces refrains qui sont plus sérieux qu'ils n'en ont l'air. Les deux derniers papes - que ce soit Jean-Paul II avec ses hymnes répétés à la vieille Europe ou Benoît XVI avec les méditations exigeantes qu'il mène partout et dont le Discours des Bernardins peut être considéré comme emblématique - ont manifestement compris l'importance pastorale de la culture, comme "bain" à partir duquel peut se développer à nouveau, au-delà des fausses satiétés de la Consommation à outrance, un véritable désir de Dieu.

Tant que l'homme a été "un animal religieux", ce "naturel" (qui n'était pas le désir naturel de voir Dieu mais le besoin naturel du "sacré") pouvait constituer la base à partir de laquelle l'évangélisation avait lieu. Il me semble que depuis la disparition en Europe occidentale de l'animal religieux, seule la culture peut constituer le nouveau point de départ, seule une connaissance culturelle de Dieu et du christianisme peut être cette praeparatio evangelica toujours nécessaire pour que les esprits supportent ce que Benoît XVI dans La Porte de la Foi, appelle encore "la nouveauté radicale du christianisme", l'extraordinaire bonne nouvelle de notre divinisation... Si seulement nous la voulons.

18 commentaires:

  1. Pourquoi les gens prient-ils, quelle que soit leur religion ? La prière est en effet la première caractéristique de l’homme religieux. Il ne peut en être autrement : dès que quelqu’un accepte l’existence de Dieu, il ne peut que vouloir s’adresser à Lui. Mais voilà chose proprement incompréhensible : vouloir abolir la distance entre soi et Dieu, et se trouver près de Lui !
    C’est ici qu’apparaît la distance entre une religion, au sens strict du terme, et ce qui peut y ressembler. Entre la véritable prière et ce qui lui ressemble. Car il existe de nombreuses formes de prière. Souvent il s’agit simplement de réflexion, d’introspection ou de recherche personnelle de clarification. Ou encore une sorte de sentiment profond de communion avec la nature, l’impression d’être porté par le cosmos. Est-ce réellement de la prière ? Est-ce de la réflexion ? Où donc passe la frontière ?
    Elle se trouve là précisément où je prends distance avec moi-même et le monde, pour entrer en contact avec un autre, un Tu. Prier consiste toujours à chercher une relation avec un autre, avec l’Autre. Alors que la réflexion incline à penser ; c’est une activité noble et indispensable, mais ce n’est pas la prière. Celle-ci consiste à s’ouvrir au dialogue, et non à se tenir dans la sécurité de ma propre existence. La différence entre la prière et la réflexion s’observe à la formulation suivante : « Dieu est infiniment grand et bon ». Cette phrase appartient au registre de la réflexion. La prière par contre dira : « Dieu, tu es infiniment grand et bon ». Tout se résume à une affaire de pronom, à l’utilisation du Il ou du Tu. Cela fait un monde de différence. La prière relève du dialogue, la réflexion du monologue. C’est une bonne chose, mais différente de la prière.
    Qui suis-je ? Qui est Dieu ?
    D’où la prière surgit-elle ? Elle naît là où je prends conscience de qui je suis, et de qui est Dieu. Si Dieu est Dieu, s’il est présent, de mon coeur jaillit une source que personne ne peut contenir. Je vais m’adresser à Dieu et lui parler.
    Il est vrai qu’une pierre peut encombrer la source, mais elle ne peut jamais empêcher l’eau de s’écouler. Après une longue période de l’histoire récente où l’action semblait l’emporter en valeur sur la prière, celle-ci revient aujourd’hui sur le devant de la scène. Les librairies proposent des tas de livres sur la prière et sur tout ce qui peut y ressembler. La prière est de nouveau à la mode. La pierre qui tente avec le plus d’obstination d’empêcher l’eau de couler est celle qui entretient le mensonge sur ce que je suis et sur ce que Dieu doit être. Si je pense être le centre du monde, totalement indépendant et autonome, soi-disant totalement moi-même, la vérité sur moi est absolument faussée. Car je ne suis pas autonome ; je suis dépendant. Je proviens d’un point que je n’ai pas décidé moi-même : ma naissance. Et je vais vers un point que je ne détermine pas non plus moi-même : ma mort.
    2
    La vérité sur moi-même consiste à reconnaître que je ne tiens pas ma vie totalement entre mes mains. Et la vérité sur Dieu, c’est qu’il est Dieu, et non ma créature, même si je lui ressemble. Qui comprend ces choses se tient dans une paisible relation de joyeuse dépendance créationnelle.
    Le Dieu de ses désirs
    La première chose qui surgit alors en moi est une tendance spontanée à aller vers Celui qui est plus grand que moi. Pour lui demander beaucoup de choses, dans un premier temps, car je suis limité. Mais ensuite, de plus en plus, pour l’aimer, pour le louer et le bénir, pour le remercier.
    Au fond du coeur humain gît un irrépressible désir de Dieu, de même qu’on trouve chez l’enfant une aspiration innée envers un père et une mère. Ultérieurement la relation filiale peut s’assombrir et devenir conflictuelle ; mais alors le rapport filial et parental est étouffé. Il en va de même entre l’homme et Dieu ; spontanément, l’homme se dirige vers Dieu comme une boussole indique le nord, et seul un trouble du magnétisme peut changer cela. Il existe bien des parasites ; mais quand je suis vraiment moi-même, je ne puis pas ne pas chercher Dieu.

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  2. Le désir de Dieu est inscrit dans le cœur de l’homme, car l’homme est créé par Dieu et pour Dieu ; Dieu ne cesse d’attirer l’homme vers Lui, et ce n’est qu’en Dieu que l’homme trouvera la vérité et le bonheur qu’il ne cesse de chercher :

    « L’aspect le plus sublime de la dignité humaine se trouve dans cette vocation de l’homme à communier avec Dieu. Cette invitation que Dieu adresse à l’homme de dialoguer avec Lui commence avec l’existence humaine. Car si l’homme existe, c’est que Dieu l’a créé par Amour et, par Amour, ne cesse de lui donner l’être ; et l’homme ne vit pleinement selon la vérité que s’il reconnaît librement cet Amour et s’abandonne à son Créateur (GS 19, § 1). »

    28 De multiples manières, dans leur histoire, et jusqu’à aujourd’hui, les hommes ont donné expression à leur quête de Dieu par leur croyances et leurs comportements religieux (prières, sacrifices, cultes, méditations, etc.). Malgré les ambiguïtés qu’elles peuvent comporter, ces formes d’expression sont si universelles que l’on peut appeler l’homme un être religieux :

    « Dieu a fait habiter sur toute la face de la terre tout le genre humain, issu d’un seul ; il a fixé aux peuples les temps qui leur étaient départis et les limites de leur habitat, afin que les hommes cherchent la divinité pour l’atteindre, si possible, comme à tâtons, et la trouver ; aussi bien n’est-elle pas loin de chacun de nous. C’est en elle en effet que nous avons la vie, le mouvement et l’être (Ac 17,26-28). »

    29 Mais ce " rapport intime et vital qui unit l’homme à Dieu " (GS 19, § 1) peut être oublié, méconnu et même rejeté explicitement par l’homme. De telles attitudes peuvent avoir des origines très diverses (cf. GS 19-21) : la révolte contre le mal dans le monde, l’ignorance ou l’indifférence religieuses, les soucis du monde et des richesses (cf. Mt 13,22), le mauvais exemple des croyants, les courants de pensée hostiles à la religion, et finalement cette attitude de l’homme pécheur qui, de peur, se cache devant Dieu (cf. Gn 3, 8-10) et fuit devant son appel (cf. Jon 1, 3).

    30 " Joie pour les cœurs qui cherchent Dieu " (Ps 105, 3). Si l’homme peut oublier ou refuser Dieu, Dieu, Lui, ne cesse d’appeler tout homme à Le chercher pour qu’il vive et trouve le bonheur. Mais cette quête exige de l’homme tout l’effort de son intelligence, la rectitude de sa volonté, " un cœur droit ", et aussi le témoignage des autres qui lui apprennent à chercher Dieu.

    « Tu es grand, Seigneur, et louable hautement : grand est ton pouvoir et ta sagesse n’a point de mesure. Et l’homme, petite partie de ta création, prétend Te louer, précisément l’homme qui, revêtu de sa condition mortelle, porte en lui le témoignage de son péché et le témoignage que Tu résistes aux superbes. Malgré tout, l’homme, petite partie de ta création, veut Te louer. Toi-même Tu l’y incites, en faisant qu’il trouve ses délices dans ta louange, parce que Tu nous a fait pour Toi et notre cœur est sans repos tant qu’il ne se repose en Toi (S. Augustin, conf. 1, 1, 1). »

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  3. Cher Guillaume,

    Si, comme vous le répétez à la suite de Cajétan, il n’existe pas de désir naturel de voir Dieu, ni d’appétit naturel de la béatitude surnaturelle, comment expliquez-vous que les damnés, anges ou âmes humaines, souffrent de la peine du dam, c’est-à-dire d’être privés de la vision béatifique ? Comment peut-on comprendre cette peine, qui est en soi plus grave et plus douloureuse que la peine du sens, autrement que par la scission térébrante de la conscience entre son désir naturel de Dieu et sa haine élicite de ce même Dieu ? Et comment Dieu peut-il damner le pécheur en toute justice si celui-ci n’est pas pré-ordonné par nature à le voir et à l’aimer en lui-même ? La cohérence de votre position n’exigerait-elle pas que nous ayons, en définitive, à choisir entre le ciel et les limbes, plutôt qu’entre le ciel et l’enfer, comme nous l’enseignent le Seigneur et son Église ? Tout le drame de la condition humaine s’en trouverait évacué.

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  4. L'"animal religieux" ne disparaîtra jamais en Europe occidentale ni ailleurs. Ce qui est possible, c'est qu'il se transforme, s'adogmatise, se paganise, se platonise (aux petits pieds, mais non pas sans culture), s'américanise enfin, pour nous donner l'illusion que Dieu peut nous apporter tout l'argent dont nous voulons disposer. Je pense au best-sailer de Neal-donald Walsh, "Conversations avec Dieu", que j'ai lu intégralement. Ce n'est pas du tout un livre inetpe ou déculturé. C'est un livre qui part du principe que dieu Est à la portée de notre désir tout en usant et abusant des "vérités contraires", et sans imbécillité aucune.

    Faut-il "un dieu simple" à nos coeurs complexes? Cela, le christianisme le dit aussi. Mais quand on entre dans les détails, on a une doctrine qui ne se donne qu'à qui entre dans la Lumière de la foi et par là dans la connaissance et dans l'amour de dieu. Autrement dit, croire est un préalable. Ce préalable n'est pas donné à tout le monde. La question de thierry n'a pas cessé de retentir à mes oreilles:

    "On fait quoi quand on n'a pas la foi?"

    On se cultive? On entre par la connaissance? Le chemin que vous proposez est le chemin inverse de celu de l'abbé Huvelin sommant l'impénitent charles de foucauld de se mettre à genoux, de se confesser d'abord et de voir ensuite à étancher sa soif de connaissance! Ou bien vos deux approches ne sont-elles incompatibles qu'en apparence?

    Une chose est certaine: la société n'a jamais conditionné personne à l'athéisme ou à la foi. Notre société n'est aucunement athée. Elle croit en ses valeur et en ses idoles. Si vous voulez, elle est néo-païenne, comme on m'a reproché il y a peu de ne pas vouloir le comprendre. Croire que c'est la société qui devrait conditionner l'"animal religieux" à se tourner vers le vrai dieu, c'est faire bien peu de cas de la liberté de la "personne" s'élevant contre, sachant au besoin se poser en s'opposant, quand elle n'aime pas le monde dans lequel elle vit. Croire qu'il y auraitt de nos jours un conditionnement athée, c'est un peu comme jeter à nos politiques la responsabilité de l'état de notre nation. Notre nation et notre foi collective sont le résultat de la somme de nos investissements personnels envers la france ou envers dieu. Nous sommes responsables de notre foi et de notre pays.

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    1. Voyez-vous cher Julien, une fois encore ce matin, en découvrant votre post ci-dessus, je suis impressionné par l'attention que vous portez aux choses, sans parler de votre respect pour les personnes, fussent-elles des contradicteurs, ainsi qu'en témoigne votre dialogue tout récent avec Herménias, sur le topic ouvert par notre Webmestre, à propos de l'apostasie silencieuse.

      Au moment où j'ai décidé de ne plus trop déranger ici, les métablogueurs et les métablogueuses, avec mes questions....disons "transversales", voilà que vous me renvoyez à moi-même, en rappelant mon interrogation d'il y a plusieurs mois, que j'ai peut-être regretté d'avoir posée ici, où elle n'a guère sa place, finalement.

      J'ai mesuré, en effet, les limites de ce qu'un "catholique athée", telle est ma situation, peut espérer d'un dialogue avec ses frères "croyants", et ce fut une bien riche expérience, pour moi en tout cas. Avoir l'honneur de partager avec vous tous, un climat d'une extrême liberté intellectuelle, doublé d'un espace où l'amitié virtuelle le dispute à la hauteur des conceptions, n'est pas chose banale.

      Pour le reste, il me semble que la différence entre ceux qui s'imaginent l'Au-delà - par immanence - inconnaissable, et ceux qui le voient "révélé" par Dieu, n'est pas si grande que cela....Aïe! je vais en faire hurler plus d'un! et qu'ils veuillent bien m'en excuser, une fois encore!

      P.S. A toutes et à tous, une excellente seconde partie d'été, à commencer par notre Père Guillaume, dans sa thébaïde du Pays de Rennes, ainsi qu'à notre cher Webmestre.

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  5. au premier anonyme qui nous cite manifestement un extrait d'un livre dont nous aurions aimé connaître l'auteur (et si c'est lui, chapeau!):

    "La prière naît du dialogue, la réflexion du monologue". Et la prière naît encore du sentiment heureux que j'ai de ma dépendance envers dieu.


    Laissez-moi simplement vous narrer une expérience que je crois assez inédite.

    J'ai tenté d'être athée vers l'âge de sept ans; plus tard, j'y suis arrivé (vers l'âge de dix ans) et j'ai coutume de dire, parce que c'est la vérité, que ce fut la période la plus heureuse de ma vie. Après cette seconde période d'athéisme, j'ai recouvré la foi, et ce fut le transport le plus heureux de ma vie. Plus tard, le bonheur est passé; mais je n'ai jamais oublié le souvenir du transport, ce qui a créé un lien indissoluble entre dieu et moi, émotionnel, me direz-vous, mais relevant d'une Expérience quasi sensible, d'une rencontre avec un Dieu mettant un coeur d'enfant à l'effusion.

    Je reviens à ma première période d'athéisme. Mon enfance était assez ballottée, devait faire face à des problèmes assez denses. Aussi, ne pouvais-je m'empêcher de prier. Puisque je ne croyais plus en dieu, j'avais trouvé le stratagème de prier ma "conscience". Je la tutoyais comme si elle était une partie extérieure à moi-même. Ce qui m'a fait me demander plus tard s'il y avait quelqu'un au centre de cette conscience que je tutoyais.

    Or il m'est arrivé très régulièrement ceci: que chaque fois que je m'adressais à ma conscience, il m'en arrivait du mal. J'en vins à l'alternative de ne plus prier si j'en avais la force, ou de prier dieu bien que je n'y croie plus et, l'habitude en étant reprise, la foi me revint de prier, mais elle revint de mauvaise foi, parce que j'étais forcé de reconnaître que je dépendais de dieu et que, si je ne m'adressais pas à celui Dont je dépendais réellement, les événements se retourner contre moi de plus belle. Je repriais donc de mauvaise foi et je me demande s'il ne m'en est pas toujours resté quelque chose.

    J'avais donc pris conscience que la prière supposait un Vis-A-Vis, quelqu'un que l'on puisse tutoyer; j'avais également conscience de dépendre de ce vis-A-Vis; je ne me trompais pas de vis-à-vis; je savais que je n'étais pas le centre du monde; je ne crois pas non plus que c'était moi qui me cachais de dieu comme cet Adam, ce de la genèse à qui Dieu pose la plus belle question qui soit ("où es-tu?") en lui demandant de se situer; je n'avais pas encore à rougir de grand-chose; j'avais décidé de ne plus croire en Dieu parce que dieu Se cachait de moi; et, lorsque je priais, Dieu Se montrait négativement à moi, en me faisant voir que je ne puisais pas à la bonne source, mais cela n'arrangeait pas du tout mes affaires.

    Il y avait quelque chose de cruel dans ce jeu, Dont le seul bien que j'en tirai fut que dieu finit par se montrer, mais pour me retirer presque aussitôt le bonheur, et me laisser la proie de l'être torturé que j'étais avec Lui, tandis que j'avais pu me délivrer de cet être torturé, lorsque j'avais pu abandonner dieu, dans une seconde phase d'athéisme, plus raisonnée et plus solide.

    Je livre cette expérience telle que je l'ai faite, ne l'ayant que trop qualifiée, et je laisse le soin à qui s'en sentira le discernement de l'interpréter, à mon profit et au profit de celui qui se sentira en résonnance avec cette expérience très simple d'un enfant qui ne cherchait pas alors à surjouer, comme l'état d'homme a pu lui apprendre à le faire en grandissant.

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  6. « Si nous ne croyons pas, nous n’aimerons pas… » certes…mais…
    Si nous étions « de langue germanique », nous pourrions inventer un nouveau mot en en juxtaposant deux, sans même mettre un tiret entre les deux. La langue française ne nous le permet pas. Et pourtant, il me semble que la Foi donnée par N.S.J.C est simultanée à l’amour que nous lui portons. Ce sont les 2 faces d’une même médaille, mais données ensemble. Croire, sans aimer serait chose aussi incongrue que d’aimer sans croire. « Foi-amour » serait la nouvelle parole (bien que peu esthétique) pour la religion toujours nouvelle qu’est le christianisme. On pourrait encore, outre Rhin, ajouter un 3ème terme afin de préciser notre pensée. S’il est vrai que la parole « religion » contient l’idée de « reliure » avec le surnaturel (quel qu’il soit), pour nous chrétiens, la nouveauté de notre Sauveur est de nous unir à Dieu. Il y a plus que « relier », il y a « union ». Je vous cite : « Ce Moment où notre vie et la sienne ne font qu'une seule vie. » Donc, nous pourrions dire que la nouveauté de l’Evangile c’est : « FOI-AMOUR-UNION »Impossible en français de trouver un vocable du « 3 en 1 » ! Il faudrait une jolie phrase digne du concile de Nicée qui resterait encore à inventer.
    Juste un petit mot à Julien au sujet de notre société « non- athée » :
    Depuis la nuit des temps, l’humain a été religieux. Il a centré sa vénération sur un « autre » que lui-même. Dieu transcendant, ou dieux multiples, forces naturelles ou obscures, les traces d’un paradis perdu se sont enracinées de façon diverses dans la conscience humaine, recouverte pourtant d’un oubli si épais que seule la Révélation et l’Incarnation pouvaient balayer. Je ne dirais pas, comme Pascal l’affirme au sujet du chrétien, que l’humain a toujours eu conscience de l’infini de sa finitude et de l’infini de Dieu, mais, il y a quelque chose qui y ressemble tout de même.
    Lorsque, il n’y a que 250 ans environ, une bagatelle à l’échelle de l’histoire, la philosophie occidentale se permettra de changer le point focal des religions, il y aura glissement de terrain idéologique. On ne « craint » plus, on « adore » plus un autre ou le « totalement Autre » que soi, mais soi-même. Et, puisque ce sentiment de finitude humaine est insupportable, on inventera la dialectique et l’évolution vers l’Esprit. Pourquoi pas ? Tout se tient, mais c’est un effort prométhéen, sans Dieu. Voilà, succinctement résumé, l’invention moderne : l’athéisme. Nos idoles ne sont d’ailleurs que les 3 concupiscences dont parle Pascal : le désir de sensations, le désir de savoir, le désir de dominer. Le centre, c’est toujours notre nombril !
    Donc, bien sûr que l’athéisme est un conditionnement social ! Il ne faut pas oublier que, dans notre pays, si l’athéisme a été imposé au XVIIIème siècle par la violence et dans le sang, le travail de « finition » a été laissé au siècle suivant et à sa clique de Francs-maçons. Jules Ferry avait bien compris que pour évacuer totalement l’idée de Dieu dans la population, il fallait s’y prendre chez les enfants, dans les écoles et chez les femmes. Ce fut fait d’une manière systématique. Depuis ce temps mémorable, des générations entières d’hommes et de femmes sont éduquées sans aucune référence religieuse : des lobotomisés de l’Esprit ! Tous passés chez les Jivaros, réducteurs de tête !
    Par voie de conséquence, la culture chrétienne est une contre culture. Peut-elle être une praeparatio evangelica ? Tout cela est bien joli mais qui permettra de la répandre ? Notre gouvernement ? Tous Francs-maçons ou fils et fille de…
    N’est-ce pas à l’Eglise qu’a été donné l’injonction d’aller évangéliser les nations ? On en revient à la case « départ » : A condition qu’Elle le veuille…
    Benoîte

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  7. Milord, c’est vrai que julien s’est souvenu d’une de vos phrases. Cela prouve qu’il lit correctement les commentaires des autres. Tout à son honneur !
    Figurez-vous que, lorsque je suis arrivée sur ce blog, il n’y a pas si longtemps que ça, vous m’avez aussi surprise car vous avez écrit que vous étiez un : « catholique-agnostique ». Mon ordi ne comprend pas le terme. Il me le souligne en rouge ! Moi non plus, je n’y ai rien compris, mais par contre, je n’ai jamais osé vous demander des explications. C’est pourquoi, aujourd’hui, me cachant derrière Julien, je me permets, timidement, de vous en faire la demande ! (si le cœur vous en dit !)
    De même que je voulais aussi vous demander : pourquoi Schopenhauer ? Si ces questions sont trop personnelles, oubliez-les !
    @ Julien,
    Je crois que vous savez tout ce qu’il faut savoir sur Dieu, mais que peut-être, vous ne vous abandonnez pas totalement. Le Christ ne nous demande rien d’autre !
    Au sujet de la prière, on pourrait écrire des montagnes de choses dont le sommet atteindrait peut-être le ciel, mais l'abandon total de soi entre les mains du Père, ça c'est la vraie prière.
    Benoîte

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    1. Oui Benoîte, Julien est un homme d'honneur et j'apprécie, en oûtre, énormément son style "torrentiel" d'écriture, si original et profond, même si je ne suis pas calé comme lui, et que certaines choses m'échappent.

      Je n'en apprécie pas moins votre humour (l'ordi qui souligne l'incohérence en rouge) et puisque vous me faîtes le plaîsir de vous intéresser un instant à mon cas: je suis catho. jusqu'au bout des ongles mais le hic, c'est l'appontage....Vous savez, sur les porte-aéronefs, une fois qu'on est catapulté, il faut bien revenir à la maison et "accrocher le brin", qui est un cable d'acier tendu en travers du pont d'envol....faut pas le rater mais moi! pas moyen de l'accrocher, je le rate à chaque fois et me voilà reparti dans les airs....je me demande combien de temps ça va durer comme ça, c'est-y qu'il faut assez de carburant pour refaire un nombre indéterminé de tours, pour se remettre dans l'axe de la piste....un vrai cauchemard! Mais bon! Je fais avec!

      Regardez ce petit document, Comtesse, ça vous donnera une idée du problème.
      Chef de pont: LV Guirec Doniol, un sacré bonhomme, dont la carrière a été magnifique. Il a d'ailleurs été plus tard, le Pacha du Clém. en personne, entre autres commandements.

      http://www.youtube.com/watch?v=OgY8Va4ZDzw

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  8. Milord, très beau ce documentaire. Quels magnifiques oiseaux ! Ca doit être grisant, en temps de paix, ces appontages.
    Dans la vie ordinaire, je me demande qui les réussit à chaque coup ?! Faut pas vous en faire ! Nous sommes tous des vers de terre… et si on peut devenir, un jour, un ver luisant, petite lumière dans l’obscurité du monde, que désirer de plus ?
    En attendant (pas trop tout de même) Dieu nous donne le carburant, gratis. (sans les fluctuations monétaires du brut !)
    Bon envol, sans cauchemar !
    Benoîte

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    1. C'est moi qui vous suis très reconnaissant, Benoîte, d'avoir pris la peîne de visionner ce lien, que je remercie tout particulièrement notre cher Webmestre, d'avoir bien voulu valider, quoiqu'il fût sans rapport évident avec le sujet du topic, et bien qu'il illustrât à merveîlle, l'impossible appontage.

      Le petit ver luisant "dans l'obscurité du monde" est une fort belle image également, Comtesse, qui faîtes remonter à ma mémoîre, les soirées de l'enfance, passées à travers champs, avec les petits camarades du village, finalement les vrais amis d'une vie, en contemplant à l'infini le ciel étoilé, perchés et pouffant de rîres joyeux, tout en haut des meules du foin fraîchement coupé du jour....

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  9. cher thierry,

    Faire attention aux autres me paraît être la moindre des politesses. On y est grandement aidé quand on a beaucoup de mémoire. Pour autant, je ne laisserai dire à personne que la mémoire est de l'attention qui s'en fiche.

    Chère benoîte,

    Vous me parlez de l'Abandon et vous avez certainement bien cerné ma résistance spirituelle.

    Maintenant, l'abandon, théoriquement, on y aspirerait tous, mais ça fait terriblement peur, car ça consiste à sauter dans l'inconnu, qui peut être l'amour, mais ça ne se voit pas du premier coup. Et comme je me suis intéressé pendant un temps à certains orientalisants, ce n'est pas le livre "Se libérer du connu" de Krichna Murti qui pourrait m'avoir fait changé d'avis, avec son idée que toute pensée est neuve. Le seul apport qui me semble pouvoir être tiré de l'apologie de l'instant présent dont on fait force cas est ce que me disait un jour une soeur, à la table d'un monastère, qu'il faut être comme les enfants, "tout entier dans ce qu'on fait."

    Tout le dilemme à propos de l'abandon est de savoir si la chair a été placée sous l'emprise de l'abandon, autrement dit si nous sommes nés abandonnés avant que d'être tombés, ou si l'abandon est vraiment la conséquence d'une chute originelle. Mais peut-onâvoir été déçu avant que d'être tombé?

    Et comment convertir l'abandon négatif en abandon positif!

    Mon père perdit le sien à dix ans. Il me transmit cet atavisme d'être né un enfant malheureux, qui reconnaissait lui-même qu'il l'aurait été, que son père ait vécu ou non, car une des choses qu'il regrettait le plus était de n'avoir pas eu le temps de se fâcher avec lui; et ce qu'il regrettait encore plus est que nous ne prenions pas le courage de relever ses provocations pour faire ce dont le temps lui avait manqué.

    C'est quand il a été à l'article de la mort que j'ai compris tout ça.

    Un jour, à brûle-pourpoingt, il m'a demandé:

    "Ca ne t'est jamais arrivé de te demander si tu n'avais pas été adopté?"
    Sur ma réponse affirmative, il m'a répondu que lui aussi, et ce fut comme si nous nous étions reconnus comme père et fils, dans ce sentiment d'abandon originel, normal, presque statistique, d'une adoption qui aurait dû être le mode normal de la relation parentale.

    Longtemps on a fait signé au mères qui confiaeint leurs enfants à l'adoption des actes d'abandon, ce qui était une insulte à la détresse de leur instinct maternel, en incapacité de s'exercer, et qui faisait peut-être un acte d'amour en s'assurant que leurs enfants bénéficient de conditions meilleures pour être élevé et jouir d'un confort minimum.

    Mais pour ne pas encombrer le blog de toutes ces réflexions pas très enjouées, je voudrais me citer moi-même, dans un poème que j'ai écrit et auquel il manque d'avoir été mis en forme par un dessinateur:

    http://cooperativepoetique.blogspot.fr/2010/04/abandon.html

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  10. (Suite et fin)

    Je terminerai simplement en disant que, lorsque dieu nous intime de "choisir la vie", il y a des enfants qui y semblent mieux disposés que d'autres de naissance à l'aimer, et je répète que ça n'a rien à voir avec un quelconque handicap, qui pourrait leur en avoir fait perdre le goût; c'est même caché en-dessous de la joie de vivre, dont peuvent fort bien ne pas être démunis ceux qui n'aiment pas assez la vie: c'est une prédisposition de la "psychologie des profondeurs", que je suis désolé de mettre devant les yeux de ceux qui ne croient pas en la psychologie.

    Je ne crois pas du tout que l'on crée son destin; mais je crois qu'on naît avec une attitude atavique devant la vie et que ne pas l'aimer assez, voire la contrer de toutes ses forces inconscientes ou impulsives, est une véritable croix que je connais pour la porter.

    Et inversement, il existe d'autres personnes qui sont nées aptes au bonheur et que la vie s'est ingéniée à rendre malheureuses.

    C'est cet état d'injustice transcendante ou de "mystère d'iniquité" poussé jusque dans ses retranchements les plus sordides qui m'a poussé à croire à cet état d'abandon originel comme à une norme que doivent connaître certains pour rejoindre ceux qui n'ont pas la chance de savoir la formuler.

    Et croyez bien que d'en supposer l'existence ne me fait nulement m'y résoudre!

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  11. Mon cher Julien,
    Puisque vous vous livrez à nous si librement, permettez-moi de vous faire part de ce que vos propos me suggèrent. Quelques pistes qui peut-être vous seront utiles…Ou peut-être pas…
    1-Je ne crois pas qu’il faille justifier son ou ses malheurs dans une injustice divine quelconque comme celle que vous appelez : « injustice transcendante »
    2-Il me semble que, dans votre cas, vous avez « épousé » (inconsciemment) le drame de votre père. Par amour pour lui, pour le consoler peut-être, vous avez pris sur vous, son chagrin, son sentiment d’abandon qui l’a traumatisé lorsque son père est mort. Peine dont il n’a jamais pu se libérer, n’ayant probablement pas eu l’occasion de la transformer, ni en la « disant » ni en la confiant à Dieu.
    Cette souffrance d’abandon ne me semble pas être la votre. C’est comme si un esprit étranger vous envahissait et comme si vous essayiez, sans jamais réussir, de vous en débarrasser.
    Vous vous révoltez et à juste titre, car c’est une injustice de souffrir pour quelque chose qui ne nous regarde pas directement.
    Mais, comme Don Quichotte de la Mancha, vous vous battez contre des fantômes.
    Vous confondez votre père et le « Père ». Le premier vous transmet, sans le vouloir, son angoisse d’être abandonné, le second n’a jamais abandonné personne. Par le péché originel, l’humanité se sépare de Lui, mais, Julien pensez-y tout de même… Dieu n’a aucun besoin de nous, pour continuer à être ! Et, cependant, pour nous permettre de revenir dans son Royaume, il a envoyé son fils unique que, sans vergogne, nous avons crucifié !!
    Dieu, c’est l’antithèse de l’abandon, c’est le « raccord » !
    3- Vous ne croyez pas que l’on crée son destin.
    Avant de vous posez la question d’une manière philosophique, il faudrait que vous soyez vous-même, entièrement. Débarrassez-vous du chagrin de votre père. Il ne vous appartient pas.
    S'il y a en vous de la révolte. Débarrassez-vous-en. Ce n’est pas votre affaire. La question de transformer l’abandon négatif en abandon positif, est mal posée. Vous, Julien, vous n’avez pas été abandonné.
    4- Vous vivez dans la « nuit » physiquement. Il y aurait de quoi se révolter. Vous ne le faites pas. Cela prouve bien que le nœud du problème est ailleurs.
    Quel contraste, entre la peur imaginaire, donc infondée de l’inconnu que vous avez et votre handicap qui vous met sans cesse dans l’inconnu. ! N’oubliez pas, cher Julien : « la nuit est ma Lumière » ! La Lumière, en fait est dans votre cœur. Pas ailleurs.
    La Sœur avait raison. Il faut être à ce qu’on fait.
    Ne pas penser.
    Aimer.
    Prier.
    Benoîte

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  12. Benoîte,

    Tout simplement merci!

    Avec une très grande émotion, merci!

    Cela complète d'autres points que j'avais découverts et il faudra que je les emboîte.

    Je vous dirais simplement ceci, au risque de devenir diaryste sur ce blog qui n'est pas fait pour ça: c'est que, si je n'ai jamais été abandonné, ce qui reste à voir, j'ai très souvent eu la tentation de devenir l'abandonneur.

    Mais nous pourrons éventuellement poursuivre cette conversation en privé.

    Bien à vous

    Julien

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    1. @ Cher Julien
      J'arrive sans doute un peu tard, mais je suis très ému de ces échanges entre des âmes en recherche de Dieu. Ce qu'il vous faudrait, c'est lire le récit de grandes conversions, où l'on voit bien les résistances et comment elles ont fini par céder: Léon Bloy, Charles Péguy, Ernest Psichari, Pierre van der Meer... Dieu ne serait pas Dieu s'il n'était infiniment juste. C'est nous qui voyons de travers. Quand une âme est prédestinée, le bon Dieu joue à cache-cache avec elle comme le chat avec la souris, jusqu'à ce qu'elle cède. Je pense que votre idée d'abandon est bonne en ce sens que les hommes nés avec le péché originel sont comme abandonnés, ce qui n'était pas le cas avant la chute, où ils parlaient librement avec leur Créateur. Mais il y a une semence de salut, une possibilité de rattrapage, en quelque sorte (Gen. 3,15). Dieu veut tout de nous, tant que l'on ne s'est pas donné entièrement, on n'a rien donné à Dieu. Il faut avoir confiance car Il nous aime tant qu'Il nous a donné son Fils unique, comme le rappelle Benoîte. Son salut, son sacrifice s'est perpétué jusqu'à nous, ce qui prouve qu'il ne nous a pas abandonnés. Courage, bénédiction.

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  13. Cher guy robin,

    Juste un petit mot pour vous dire que vous n'êtes pas arrivé trop tard, mais surtout que, si différents que nous soyons, vous et moi, j'aime vous lire.

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  14. @ Julien,
    Voilà un extrait de la prédication de la messe de ce dimanche. Je la livre telle quelle. Le prêtre désire garder l’anonymat :
    « … mais pour passer au plan surnaturel, il y a une étape psychologique ou morale que la vie spirituelle et les sacrements aident à franchir, à guérir, c’est celle de la maladie du sourd-muet (Evangile du jour) que nous avons tous contractée. Nous sommes sourds à notre propre voix, aveugles à notre propre comportement. La façon dont nous avons grandi, vieilli, dont nous sommes fait, a façonné un « avatar »… Le petit garçon menteur devient deux personnages : l’adulte véridique que Dieu connaît, que l’on perçoit parfois au détour d’une phrase, d’une attitude et l’adulte faux, un personnage mental qui joue une comédie pour l’extérieur et qui réussit à tromper aussi l’intérieur et se rend aveugle à lui-même. C’est la jeune fille malade de boulimie ou d’anorexie qui n’entend pas son vrai être dire : j’ai assez mangé ou je crève de faim. Elle est malade et n’entend que son faux personnage qui n’est pas elle.
    A un échelle moindre, chacun peut à quelques moments de lucidité « humble », parfois très fugaces, (10 à 15 secondes au cours de la confession mensuelle) percevoir avec joie et simplicité qui il est en vérité, qui il est devant Dieu. C’est cet être que Dieu aime en nous et c’est ainsi qu’il veut nous voir devenir, redevenir, parvenir au terme d’une existence chrétienne. Car le but de la vie chrétienne, c’est cela aussi : redevenir ce que nous sommes, devenir l’œuvre d’art que le créateur a voulu avant la défiguration du péché, du mensonge et du maquillage.
    Remarquez que, parfois, les moyens rudes du Seigneur et les peines, font plus pour gratter la fausseté de notre vie, que les « prêchi-prêcha » entendus par une oreille et ressortis par l’autre.
    …Non, ce n’est pas l’Eglise qui culpabilise avec sa morale comme on l’entend dire de nos ennemis, mais bien la société consumériste.
    Au contraire, l’Eglise est au service de notre personnalité vraie et non imposée par un moule. Le chemin de la perdition est le moule unique du péché mais le chemin du salut, s’il est unique : le Christ a mille facettes dont les Saints sont la plus spectaculaire illustration. Chaque Saint est un homme, une femme que le Christ a « rendu » à lui-même en l’élevant, à qui Il a ouvert les oreilles et qui a pu entendre sa propre voix et en faire l’instrument de Sa louange. N’ayez pas honte que la salive de Jésus vous touche ! Vous, au moins, vous retrouverez la parole. N’ayez pas honte de faire savoir que vous allez redevenir vous-mêmes en allant « à confesse » pour l’Assomption ! »
    (Benoîte)

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